Grâce à ce type de masterclasse permettant la confrontation entre instrument moderne et instrument d'époque, les jeunes pianistes découvrent l’importance de la relation à l’instrument, à sa sonorité, à son toucher. L’instrument d’époque agit comme un révélateur des liens profonds existant entre l’écriture de Chopin et la profondeur du message qu’il transmet par sa musique. Yves Henry, Président fondateur de l'association, Président du Nohant Festival Chopin depuis 2011 et auteur de nombreux enregistrements d'œuvres de Chopin sur piano d'époque, est aussi le créateur de ce type de masterclasses associant piano d'époque et piano moderne. Il délivre ci-dessous quelques unes des clefs qui font de ces masterclasses des moments uniques, destinés tout autant à un public averti qu'à un public néophyte.

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Dans la vie d’un interprète, les années de formation sont marquées par des rencontres. Tout d’abord celle avec un premier professeur, celui ou celle qui vous donne envie de vous consacrer à la musique. Puis vient le temps où une rencontre avec un ou plusieurs grands maîtres vous ouvre des perspectives nouvelles, parmi lesquelles il sera difficile de choisir. Au fond, comment être certain que le chemin que vous prenez est le bon ? Dans l’enseignement de la musique et en particulier de l’art d’interpréter, il y a peu de certitudes et le seul moyen pour un jeune musicien est souvent de faire confiance à ceux qui le guident. Dans cette confrontation avec un professeur, il manque un élément toutefois essentiel : le public. Et c’est pourtant pour ce public que l’interprète joue.

La masterclasse pallie à ce manque en mettant en scène le pédagogue, l’interprète « apprenant » et le public. Ce dernier constitue, par sa seule présence, par son écoute attentive, un élément qui tend à rééquilibrer l’échange entre les deux acteurs. D’un côté, le jeune soliste doit convaincre le pédagogue par son jeu, mais il doit aussi séduire le public. De l’autre, le pédagogue a une obligation de résultat, non seulement envers celui auquel il prodigue ses conseils, mais aussi envers le public qui est en quelque sorte le juge suprême : les conseils prodigués ont-ils un effet positif et mesurable ? Le message du compositeur lui parvient-il plus clairement, dans toute sa richesse et sa complexité ? Lui procure-t-il des émotions plus fortes, lui fait-il même oublier qu’il est assis dans une salle en train d’écouter un interprète ?

L’enjeu de la masterclasse est donc de confronter les interprétations apprises, réfléchies, décidées et travaillées, avec la sensibilité d’un public, certes prêt à lui faire crédit mais désireux aussi de comprendre pourquoi et par quels moyens une interprétation peut devenir tout à coup étonnamment « parlante » et le toucher au plus profond de lui, alors que quelques instants plus tôt elle n’était que « conforme » à ce qu’il a l’habitude d’entendre.

Les enjeux de cette masterclasse sont multiples :

- offrir aux jeunes pianistes d’aujourd’hui la possibilité de découvrir ce qu’était le piano à l’époque romantique et plus particulièrement ceux que Chopin utilisait pour composer et pour se produire en public, c’est-à-dire les instruments de Pleyel

- permettre à ces mêmes jeunes pianistes de se rendre compte de l’effet d’un choix interprétatif sur le public, ce qui est quasiment impossible à réaliser en dehors d’une masterclasse

- permettre au public de passer de l’autre côté du miroir, de pénétrer un peu dans un domaine où il n’a en principe pas accès, celui des mécanismes qui régissent l’interprétation.

On comprend pourquoi ces masterclasses sont des moments privilégiés : il s’y construit un monde éphémère mais fascinant, celui qui consiste à faire vivre aujourd’hui des chefs-d’œuvre du passé.

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